vendredi 4 mai 2012

PRESSE


Un comédien en coulisse

   Emile Salvador a réalisé cette année une véritable performance d'acteur à l'occasion des «Théâtrales du Velay». Interprète du rôle-titre dans L'Héritier ridicule mais également présent dans la distribution de tous les autres spectacles du festival, il était aussi responsable du stage d'art dramatique. Portrait d'un comédien hors du commun



L
es Théâtrales du Velay ont fermé leurs portes lundi soir, les échos des dernières  répliques échan-gées tout au long le ces dix jours de spectacle flottent, pour un moment encore, entre les tours et les cré-neaux édentés du château d'Ar-lempdes.

Déjà, on se surprend à imaginer pour l'année prochaine un festival devenu encore plus important, une programmation toujours placée sous le signe de la qualité et des artistes aussi talentueux que ceux que le public, toujours plus nombreux, a eu la chance de découvrir lors de cet-e 3e édition. Il en est un, en particulier, qui méritait bien un portait, non seulement pour rendre hommage à son grand talent de comédien mais également parce qu'il a été le lien, l'âme artistique de ces Théâtrales, cuvée 97 : Émile Salvador.
Un acteur dans l'âme
Emile Salvador est né au Maroc en 1942 et y a passé ses quinze pre-mières années. Il ne connaît pas encore le théâtre nais découvre sa vocation de comédien en dévorant tous les films américains qui sont à l'affiche des cinémas de son quartier. James Dean, Marlon Brando, Paul Newman, Burt Lancaster, Kirk Douglas, autant de grands acteurs qui le font rêver et à qui il s'identifie : «comme certains mômes ont envie de devenir pilote d'avion ou footballeur  professionnel   moi   j’avais envie de devenir acteur de cinéma !» explique-t-il.
Un de ses amis d'enfance voulant devenir réalisateur, c'est ensemble qu'ils partiront à Paris tenter leur chance. Là, Emile va choisir sans hésitation de suivre des cours d'art dramatique inspirés de l'Actor Studio américain d'où sont issus tous les grands acteurs qu'il admire et, plus récemment Al Pacino, Dustin Hoff-man, Robert De Niro. On y pratique la méthode «Stanislavski» qui consiste à travailler sur la véracité, la crédibilité des personnages, sur la recherche de l'authenticité.
Pour lui, l'intérêt de cette méthode réside dans le fait qu'elle permet de s'investir d'une façon très grande dans un rôle, tout en conservant toujours le contrôle de soi-même: «c'est un peu le paradoxe du comédien de Diderot! Il faut toujours tout contrôler même si on se met dans un état de disponibilité qui fait que l'on peut improviser et que tous nos sens, notre émotivité, notre réceptivité sont exacerbés. Il n'est pas question d'aborder un rôle de manière extérieure et de faire de la caricature. Mais si je joue un fou, Othello qui étrangle Desdémone, il est bien évident qu'il faut toujours contrôler ce que l'on fait, sinon il faudrait changer de Desdémone tous les soirs!».
Il a travaillé avec les plus grands
Très vite, les contrats vont s'enchaî-ner et Emile va alors arrêter définiti-vement les boulots «alimentaires» pour se lancer corps et âme dans l'aventure théâtrale. Il reconnaît d'ailleurs que c'était certainement plus facile il y a trente ans qu'aujour­d'hui, de laisser tomber ainsi une certaine sécurité matérielle, pour se consacrer au monde du théâtre, bien aléatoire par les temps qui courent.
Pour lui, si les menaces qui pèsent actuellement sur le statut des intermittents du spectacle venaient à se concrétiser, cela signifierait la mort de la profession et ne ferait que renflouer la masse des chômeurs du régime général: «on a déjà beaucoup de mal en tant qu'intermittent a tra­vailler les fameuses 507 heures qui nous permettent de toucher une indemnité Assedic et donc de vivre de ce métier, alors si ces conditions sont supprimées, il y aura une bonne partie de la profession qui ne pourra plus exercer ce métier».
En attendant, la carrière d'Émile Salvador se porte bien, il a travaillé avec de grands metteur en scène, tels que Catherine Dasté ou Jean-Pierre Vincent (directeur de la maison de la culture de Nanterre) avec qui d'ailleurs il a collabore pendant trois ans. Il avoue avoir énormément appris grâce à lui: «c'esf un homme de théâtre important, il a cette gran­de humilité qui consiste à abor­der chaque nouvelle pièce com­me si on partait de rien, que l'on n'avait pas d'expérience. Et c'est ça qui est formidable et qui fait la beauté de ce métier, c'est
d'avoir encore la possibilité d'être naïf, de s'enthousiasmer pour un rôle ou une pièce, de garder cette part de rêve, d'en­fance... on dit toujours que les co­médiens sont de grands enfants, je crois que ce n'est pas une lé­gende!».
Les rôles les plus prestigieux
Également professeur au conservatoire du ^"arrondisse­ment de Paris, Emile a, vis à vis de son propre jeu, la même exi­gence que celle qu'il dispense à ses élèves. Il refuse d'appréhen­der un nouveau rôle avec des idées préconçues et cherche à être le plus «vierge» possible pour construire son personnage en collaboration avec le metteur en scène: «il n'est pas question de se reposer sur ses acquis, comme c'est malheureusement le cas dans certains théâtres. Je ne parle même pas du théâtre de boulevard où le jeu est com­plètement basé sur des effets, sur une mécanique, l'esbrouffe quoi!».Quand on aborde le sujet du répertoire et des rôles qu'il rê­verait d'interpréter un jour, c'est avec une grande humilité cfu'il avoue préférer attendre encore quelques années pour s'attaquer à un rôle tel que celui du roi Lear. Pour l'instant, le personnage de Philippin, qu'il interprétait avec brio dans L'héritier ridicule de Scarron, lui a donné l'envie de jouer d'autres rôles aussi haut en couleur/tels que le Bourgeois Gentilhomme ou le Malade ima- ginaire. Il reconnaît avoir égale­ment une tendresse particulière pour Sganarelle dans Dom Juan ou pour Figarqde Beaumarchais: «j'ai la chance depuis que j'ai dé­passé l'âge de jouer les jeunes premiers de me voir offrir de beaux rôles, riches et intéres­sant, qui me permettent de m'épanouir et de peaufiner mon métier. C'est un boulot qui est perfectible à longueur de vie!
Mon plus grand souhait sera que dans 10,15 ou 20 ans, je éo toujours en train de perfection ner mon métier d'acteur».
Alors souhaitons pour hoti plus, grand plaisir de spectatei qu'Emile Salvador réalise se voeux et continue encore Ion; temps à exercer son art avec ii tant de passion et dé-sincérité
Véronique DUMOULII

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